Les patrons de pêche manquent de bras. Pour déclencher des vocations, ils peuvent désormais prendre sous leur aile des apprentis matelots. Une nouvelle formation vient d’être lancée par le lycée maritime du Portel.

Les jeunes peuvent désormais prendre la mer en tant qu’apprentis marins-pêcheurs

Dorian Framery sera peut-être le premier apprenti matelot d’une longue lignée. Ce jeune de 17 ans, qui habite Neufchâtel-Hardelot, a commencé sa formation par alternance en novembre. Depuis, il passe une semaine en cours, au lycée maritime du Portel, et une autre sur le fileyeur Don Lubi 2, qui appartient à Stéphane Pinto. Un virage à 180º pour lui, après un an de CAP maçonnerie. «  Comme il n’y a pas beaucoup de boulot dans le bâtiment en ce moment, j’ai voulu changer  », dit-il.

« C’est un métier dont la pratique réelle s’apprend à bord du bateau. »

Quelques semaines après, Dorian ne regrette pas son choix. Le froid et le travail physique ne lui font pas peur. « Il faut juste être rapide »

Son maître de stage est convaincu de l’intérêt de cette formation. « C’est un métier dont la pratique réelle s’apprend à bord du bateau, estime Stéphane Pinto. Et comme chaque patron a sa manière de travailler, cela permet de former son apprenti à sa propre technique »

« On va manquer de pêcheurs »

Cette formation de CAP matelot n’existait pas jusqu’ici. Le lycée maritime l’a lancée à la demande des professionnels (lire ci-dessous). « Nous avons du mal à attirer les jeunes vers ce métier, confirment les responsables de la Coopérative maritime Etaploise. Comme le nombre de bateaux augmente actuellement, on va manquer de main-d’œuvre. Le vivier local de pêcheurs n’est pas extensible… »

Pourtant, les salaires restent attractifs, assurent-ils, et les possibilités de progresser aussi. Mais la dureté du métier rebute parfois les jeunes, qui préfèrent se diriger vers des filières plus « confortables » comme la marine marchande.

Des patrons encore frileux

Pour l’heure, seuls trois contrats d’apprentis ont été signés avec le lycée. Les patrons de pêche sont encore frileux. « L’activité n’est pas au beau fixe et ils n’ont pas trop envie de s’engager » confirme Stéphane Pinto. « Mais cela permet aussi de montrer que l’on croit encore à ce métier » Et d’offrir à des jeunes la possibilité de prendre la relève…
Une formation en 2 ans

Comment ça se passe ?

Ce CAP en apprentissage se déroule sur deux ans. Il est ouvert aux jeunes de 16 à 18 ans. Seule condition : trouver un bateau et un maître de stage (même si le lycée peut jouer le rôle de facilitateur).

Le principe ?

L’apprenti passe une semaine au lycée maritime, une autre en mer. Les semaines de cours durent 32 h, dont 16 h d’enseignement généraliste et 16 h de cours spécifiques (description du navire, machines marines, navigation, océanographie...).

Combien ça coûte ?

La formation est gratuite. L’apprenti perçoit un salaire qui varie selon son âge (de 370 € à environ 1 000 € par mois). Il bénéficie de cinq semaines de vacances par an. Il peut aussi loger à l’internat du lycée et manger sur place.
Éliane Maheut, directrice du lycée maritime du Portel : « Une manière d’amener des jeunes dans le métier »

Le lycée maritime du Portel propose cette formation en apprentissage depuis le mois de novembre, en plus du cursus traditionnel autour des métiers de la mer. Éliane Maheut, sa directrice, nous présente le dispositif.

Pourquoi avez-vous lancé cette formation ?

« C’était une demande des pêcheurs professionnels, qui rencontraient des problèmes de recrutement. Cette formation est une manière pour eux de faire du recrutement pérenne, d’amener des jeunes dans le métier, alors que la formation traditionnelle propose aux élèves beaucoup de débouchés, pas seulement vers la pêche. »

Combien de places sont ouvertes ?

« Pour l’instant, nous formons trois apprentis, et deux autres pourraient arriver bientôt. On a des touches avec d’autres patrons mais ils sont assez prudents car c’est nouveau. Et puis le patron doit vraiment jouer un rôle actif de maître d’apprentissage. Il doit avoir certaines facultés pédagogiques et la volonté de transmettre son savoir. »

Allez-vous encore développer cette formation ?

« Notre objectif, c’est d’accueillir dix apprentis maximum par an et par niveau. Nous n’avons pas vocation à en former des milliers. Cette formule doit correspondre aux jeunes que l’on accueille. C’est une formation plus individuelle, mais qui nécessite aussi un travail personnel plus important, avec un investissement et une implication importante de la part de l’apprenti. »